Custo diariste

Accoucher à Saint Elisabeth ❤

Comme il fut étrange et contre nature de me diriger directement vers le service du bloc d’accouchement avec ma valise. La nuit venait de commencer. Caroline nous a accueilli en début de garde dans ce tout petit service où elle œuvrait seule. J’espérai que le comprimé de prostaglandine agirait avant la relève pour accoucher en tout intimité mais il en fut autrement. Nous nous sommes installé dans cette salle à la déco sommaire mais néanmoins chaleureuse par ses couleurs et son mobilier. J’ai quand même du dormir sur la table faute de lit ! Pas top pour passer la nuit qui précède une longue journée de travail !

A 6h30 alors que MPL m’avait rejoint sur ma paillasse inconfortable pour m’apporter un peu de réconfort, j’ai senti et entendu un bruit sourd dans mon ventre ! J’espérai bien que ce soit le début d’un travail spontané et j’en eu la confirmation en me levant : la poche des eaux venait de rompre naturellement grace à l’ouverture précipitée du col. "Mon Dieu c’est aujourd’hui que nous allons devenir parents!"

Nous étions de toute évidence tant dans l’empressement et la joie que dans l’inquiétude. Au fond de moi et bien que je l’ai accepté par la force des choses, je me disais que je n’avais rien à faire là, que je m’apprêtais surement à vivre tout ce que je ne voulais pas. J’essayais de garder l’esprit positif en me disant que déjà les lieux étaient moins froids que ce que j’avais imaginé, le service ne tournait pas comme une usine au CHU mais avait taille humaine, les SF portait cette bonhomie rassurante si typique des gens d’ici…

Une bonne demie heure après la rupture des membranes des petites contractions sont arrivées. Une heure plus tard on venait me mettre la perf d’ocytocine et la tout s’est accéléré ! La fréquence comme l’intensité. Lorce que l’équipe du matin est venu se présenter, soit deux stagiaires, un professeur et la SF nous avons fait deux demandes :
- préserver notre intimité pour favoriser un travail naturel et ma concentration, de ce fait ne pas avoir de stagiaires ni de professeur
- et espacé les augmentations de dose pour me laisser le temps de gérer la douleur.
Elles ont été entendu mais pas respectées!
A partir de la je n’ai vu la SF que deux fois brièvement lors de sa garde ! La stagiaire, hyper gentille mais trop zélée à passer son temps avec sa main sur mon ventre pour remettre ce foutu monito qui ne tenait pas ! De plus le professeur est intervenu constamment en ne manquant pas de parler en continu. J’ai du leur demander de se taire pendant une contraction où elles ont fini par m’exaspérer ! Toutes deux avaient accoucher à domicile avec ma SF et étaient parfaitement à même comprendre ce que je vivais et ce dont j’avais besoin et pourtant ! Aucune d’elle n’a eu assez d’esprit pour retranscrire leur expérience à ce que je vivais! !

Plus le temps passait et plus je vivais l’intensité des contractions péniblement. J’avais l’impression de devoir partir loin pour rester isolée de tout ce parasitage et MPL me manquait terriblement. Je percevais sa main, sa chaleur, son odeur et entendait à peine ses mots… J’avais tellement souhaité vivre ca avec lui… ca me crève le coeur d’y repenser...dans mes répis je le sentais si loin, si seul et désarmer face a ses femmes qui lui prenaient sa place. J’avais l’impression d’être au fond d’un puit et de ne voir que lui dans le haut. Il était mon seul et unique réconfort, ma seule accroche au monde réel… mais nous étions si loin… je me sentais si seule…

En début d’après midi j’avais des contractions rapprochées depuis six heures déjà et le col n’était ouvert qu’à moitié ! ma concentration fut encore parasitée d’un cran par le changement d’équipe et l’inconfort de voir débarquer une SF bien trop protocolaire qui elle non plus ne respecterait pas nos demandes...alors j’ai laché prise et j’ai demandé la péri. Au moins je pourrai être présente pour reprendre un peu de contrôle et me saisir de ces moments avec MPL, le rejoindre pour vivre ca ensemble.

L’anesthésie fut génial, la pose s’est faite de façon confortable en étant allongée et le dosage fut parfait. Je pouvais me mobiliser et choisir mes positions pour faire avancer le travail tout en étant soulagée et donc de retour à la réalité. J’eu vraiment l’impression avant ca d’être terriblement seule…

L’après midi a été nécessaire pour grappiller péniblement les derniers centimètres(et oui la péri ralentit tout...). Heureusement nous avons au moins réussi à négocier pour que les touchers vaginaux ne se fassent pas au heure comme prévu. C’est vers 18/19h qu’on a vérifié et constaté qu’il ne manquait qu’un demi centimètre ! Je me suis félicité d’avoir pris cette anesthésie car douze heures dans ces conditions la n’auraient jamais été supportables !

J’avais profité de cette acalmie pour dire à la SF que nous avions quelques souhaits pour la naissance et que nous serions reconnaissants qu’elle puisse les respecter.
-A savoir ne pas nous dire le sexe de l’enfant mais nous laisser le découvrir
-ne pas couper le cordon de suite mais après qu’il ait cessé de battre
-prendre le temps
-ne pas accoucher en position gynéco.
Elle fut rassurance et bienveillance. Elle a entendu mais pas écouté !

Vers 19h elle m’a sondé puis m’a demandé de faire un essai de poussée traditionnelle sur les étrillés, ce que j’ai concentis à faire. On a revu ensemble comment bien pousser et on a amorcé la descente. Puis ils ont fait entrer MPL (il a fallu avant cela que je demande à être couvrete!). Bien hésitant en me voyant comme ca il a surpris la SF en lui disant "ca m’étonnait qu’elle ait envie que je la vois comme ca". Résignée et au bord des larmes je lui ai demandé de venir me soutenir dans ce que je subissais ! F avait ruser pour assurer son confort de pratique et était bien misérable pour ca !

Le travail avait été long, le discours de l’équipe laissait penser que face à la moindre difficulté ils se dirigeraient vers une césarienne et je me sentais à bout de force moral pour lutter… Alors c’est la mort dans l’âme et en faisant bonne figure que je me suis laissée manipuler de la sorte. :(

A mi parcours l’obstétricien à qui nous avions aussi exprimé nos souhaits est arrivé (c’est la procédure ici, ce sont eux qui finalisent tous les accouchements) et l’ironie du sort à fait que lui aussi avait sa stagiaire qu’on s’est vu imposé ! Bien oui faut pas imaginer qu’on vous demande votre permission!!
Après une bonne heure de poussés intensives et un gros crac m’indiquant le déplacement du coccyx, j’ai senti la tête de mon bébé arriver ! Il fallait tout donner car elle avait expulsé son méconium et risquait de l’inhaler. Quelques poussées de plus et je senti mon ventre se vider! ! Une seconde plus tard elle était sur moi et je fus prise de spasmes émotifs ! Et tout le monde avait disparu sauf nous trois ! Un instant frappant de vérité. Une claque de la vie qui vous fait passer en une seconde du fantasme à la réalité.

Bébé était là, tout chaud et tout crado ! La SF, surement un peu trop pressée de finir sa garde, le nettoya grossièrement et lui écarta les jambes en nous sommant de regarder ! "ha bin vous voyez?..." Je lui aurais mis une claque si j’avais eu l’énergie pour le faire ! A cette instant on ne pu faire autrement que de sortir de notre bulle d’émotion et de découvrir que nous avions une petite fille ! Le visage d’MPL pencher sur nous était d’une chaleur indescriptible pour moi. Le bonheur dans ses yeux et ses mots de remerciement ont marqués mon âme d’une empreinte ineffaçable. Alors que deux ou trois minutes s’étaient écoulées le doc demanda à couper le cordon en précisant qu’il avait cessé de battre. MPL s’exécuta. Ils me prirent mon bébé dans la foulée et pour l’extraire de sous ma blouse je du manipuler le cordon et voir qu’il n’avait absolument rien d’atrophié ! Encore un souhait non respecté.

Alors qu’MPL ne quittait pas Bibi (diminutif du prénom que nous lui avons donné) la SF vint se positionner près de ma tête et me dit "ne vous inquiétez pas c’est juste pour voir..." une minute plus tard, alors que le doc avait disparu et laissé sa stagiaire attendre le placenta, le SF entrepris de m’appuyer fermement sur le ventre ! Pris d’un excès de colère je dis "ha non F ! Retirer votre main de la ! On n’appuiera pas et ca prendra le temps qu’il faudra!"

On me rendit Bibi langée (heureusement car elle m’avait déjà fait pipi dessus!) et je savais que dès à présent on ne se quitterai plus. Le transfert qui me fit sortir de cet enfer ne tarda pas et ce fut sans ménagement pour la maternité…

J’écris pour oublier. Pour me délester de ces mauvais souvenirs où je me suis sentis plus vulnérable que jamais, victime d’une machinerie où le personnel se vit dans un rôle confortable d’exécutant au point d’en standardiser la clientèle, de la déshumaniser sous couvert de protocoles avec des pratiques destinées à donner bonne conscience.
Rien de ce que nous avons demandé n’a été respecté. On vient en clinique en tant que client, pour recevoir un servir qu’on paie et c’est surement le seul endroit où est prié de le subir.
Alors je décide de me souvenir du meilleur : la présence si réconfortante de mon chéri, tout son amour, sa force et sa patience, le travail commun fait avec mon bébé pour son arrivée, la joie indescriptible de le voir arriver en ce monde, nos premiers instant de bonheur en famille… pour ca j’aurai subis subit bien plus encore !