Pas de bisous!
Le "terrible two" est bien amorcé et se vit en double à la maison ! Les caractères s’affirment, se heurtent, s’émoussent simultanément… Et comme elles ne sont pas particulièrement freinées, sabrées, soumisses à notre autorité mais bien guidées, orientées dans leur vécu émotionnel et canalisées dans ce qui nous semble être les comportements les plus ajustés socialement, ce n’est pas de tous repos!
Du coup c’est le grand huit, l’ascenseur des émotions à toutes les étapes de la journée. Bien sûr on pourrait laisser ca à d’autres, à la nounou, à la collectivité principalement mais on aurait des enfants un peu trop formatés à notre gout ! Alors on gère tant bien que mal mais au plus près de ce que l’on est et ca me réjouis.
Tout à commencé avec les "nons" bien tranchants pour un oui, pour un non, à tous moments. Il a fallu opter pour des stratégies de contournements évolutives, créatives et surtout se faire une belles réserves de disponibilités et de fraicheur pour ne pas épuiser rapidement notre capital "patience".
Je commencais à avoir hâte que cette phase s’apaise, qu’un équilibre puisse se faire sentir. Ce fut le cas depuis deux semaines chez Bibi qui semble plus apaisée (même si elle régresse en optant pour des cris avec sa soeur plutôt que la parole quand elles sont en conflit).
A 3 ans passé elle a intégré quelques règles essentielles à son bon développement (attendre son tour, respecter les jeux et constructions des autres...) qui constitueront un socle favorable à ses premiers apprentissages scolaires et sa vie en société.
Quelle fut ma surprise quand elle a mis des mots sur ses émotions et à témoigner de ses élans d’amour ! "Moi te t’aime maman" avec ses yeux de tunes elle est à croquer. Je prends aussi très volontiers les énormes câlins qui vont avec et je m’en délecte.
Bibi a été sevré trop tôt et je le regrette car une distance s’est installée quand JJ est née, elle s’est alors rapprochée de son père avec qui elle avait déjà une forte proxémie. Accaparée par l’arrivée de JJ j’ai eu l’impression de subir ce changement et depuis deux ans quelque chose de nous me manquait. Depuis quelques semaines j’ai pu observer un rapprochement qui me réchauffe le coeur et semble rétablir un équilibre satisfaisant. Parfois elle s’autorise même quelques régressions, notamment quand on est que toutes les deux, et demande à être bercée comme JJ, à ce que je lui chante la même chanson…
Avec JJ qui est toujours allaitée c’est un travail de défusionnement progressif qui est à l’oeuvre tant pour elle que pour moi. Quand je la laisse en garde j’ai à chaque fois un pincement au coeur !
Mes Amours...chaque jour elles me comblent de joie. Dans des moments furtifs, quand une nouvelle expression émerge, quand je tâte une petite cuisse dodue en les surprenant, quand une course aux guillis commence promptement… ou dans des moments plus ancrés, quand Bibi joue magistralement la dramaturge en tombant au sol comme la princesse qui s’est piqué le doigt ou quand elle approche furtivement de son père qui s’est endormi d’épuisement sur le canapé pour aller lui pincer le nez !
Chaque jour depuis leur naissance je savoure chaque instant, je grave corporellement nos interractions pour intégrer des éléments de réalité : la douceur et le moelleux de leur joue qui évolue, le poids des corps et leurs dynamiques toniques qui fluctuent et s’identifient de façon plus marquée avec leur prise de maturité, la couleur de leur yeux dont les variations chromatiques se sont modifiées…
Naïvement je vis depuis plus de trois ans ces moments de bonheur sans entraves et depuis un mois une ombre vient ternir cette plénitude. Quotidiennement je regarde les infos et vois évoluer dangereusement le scénario d’une pandémie jusque là digne de bonnes séries. MPL est rassurant et confiant mais moi qui suit du milieu médical je suis plus sceptique et clairvoyante depuis les premiers jours ! En un mois l’évolution de la situation à considérablement évoluée et commence à me faire relativiser sur mes priorités ! Le mois à venir m’inquiète fortement !
J’ai peur. Peur pour mes filles qui sont si petites et vulnérables (d’autant plus qu’elles viennent toutes les deux de vivre la grippe saisonnière consécutivement et qu’on en sort à peine en étant épuisés). Peur de voir notre monde si paisible changer radicalement si une pandémie mondiale venait à se déclencher. Peur d’être en première ligne car avec ma profession initiale je serai réquisitionnée et je deviendrai un vecteur de contamination potentielle pour mes proches :( ... J’aimerai dire que je n’ose y penser car je ne suis pas de nature soucieuse ou pessimiste habituellement mais je doute fort que tout cela retombe comme un soufflé, que ce virus se volatilise avec les mesures de confinement… Si c’est miraculeusement le cas alors je serai ravis de me dire que je me suis simplement fait peur pour rien, que ma nouvelle situation de mère m’a fait extrapoler mes ressentis et mes projections au delà du raisonnable… j’espère juste pouvoir réécrire ici sereinement dans quelques semaines comme d’habitude en déroulant joyeusement l’évolution de mes projets et en teintant ce récit de joyeusetés familiales…